Quels sont les coulisses d’une transaction en ligne ? Qui sont des parties prenantes ? Un éclairage de Mustapha Badr-Ezzaman, directeur des opérations à Vantage payment systems (VPS) , une fintech spécialisée dans la gestion des technologies et moyens de paiement.
Choix des produits, validation du panier et paiement en ligne. C’est la partie visible de l’iceberg pour un client qui visite un site de vente en ligne. Mustapha Badr-Ezzaman décortique pour Médias24 la chaîne de paiement lorsque vous effectuez un achat en ligne.
Commençons par le commencement. Il y a d’abord le porteur de carte, vous ! Vous avez validé votre « panier » et désirez payer en ligne. Vous atterrissez alors sur une page où vous saisissez vos données personnelles et informations de la carte bancaire : c’est la page d’une fintech appelée Prestataire de Service de Paiement (PSP). Le e-marchand doit faire appel à un PSP pour offrir à ses clients les différents moyens de paiement dont le paiement en ligne. « Le PSP est une passerelle qui transmet les informations du porteur de carte à une autre fintech appelée acquéreur de paiement comme le Centre Monétique Interbancaire (CMI) qui est l’opérateur historique dans le domaine, depuis 2014, ou NAPS, opérationnel depuis 2017 », nous dit-il.
L’acquéreur de paiement transfère alors la demande d’autorisation à votre banque émettrice via :
§ Le Switch national HPSS dans le cas d’une carte marocaine
§ Les Processeurs internationaux dans le cas d’une carte étrangère comme Visa, MasterCard, AMEX, etc.
Ceux-ci contactent la banque émettrice pour vérifier la disponibilité de fonds. Une fois le feu vert de votre banque obtenu, cette information est transmise au système de cartes qui vous envoie un code à usage unique par SMS : on parle ici de la vérification 3D Secure qui est un système de sécurisation des paiements en ligne. Une fois l’authentification confirmée, la transaction est alors approuvée et le paiement effectué. « Ce processus de communication et de validation entre les différentes plateformes se fait en quelques secondes », précise Mustapha Badr Ezzaman.
Quel est le rôle de l’acquéreur de paiement ?
L’acquéreur est un établissement de paiement qui permet, entre autres, d’accepter les paiements en ligne. « L’acquéreur est l’intermédiaire entre le site e-commerce et les banques (celle du site marchand et celle du client) : Le e-commerçant ouvre un compte de paiement auprès de l’acquéreur, similaire à un compte bancaire mais qui ne peut jamais être débiteur. Quand la banque émettrice débite le compte de l’acheteur, le e-marchand ne reçoit pas directement le paiement. Il est placé dans le compte de paiement et c’est l’acquéreur se charge du transfert du montant sur le compte bancaire du e-marchand », explique-t-on.
Ainsi, en cas de problème (produit non conforme, retard de livraison…), c’est l’acquéreur qui garantit le remboursement de l’acheteur. « C’est comme un médiateur du paiement en ligne. Il ne donne pas automatiquement raison à l’acheteur. C’est à l’aide d’une procédure appelée Chargeback que sont définies les responsabilités des uns et des autres. Certainement, il faut protéger les consommateurs contre les arnaques mais aussi, il faut protéger les e-commerçants contre les abus », précise notre source.
Aussi, l’acquéreur évalue le risque lié à l’activité du e-commerçant et applique une caution sous forme d’un montant généralement bloqué lors des premières transactions. Il garantit ainsi la sécurisation des paiements et la protection contre la fraude.
Les commissions d’une transaction en ligne
L’intégration technique d’une plateforme de paiement dépend du profil du e-marchand. S’il est de petite taille, il se lance dans le e-commerce en utilisant généralement des CMS en SAAS simple d’utilisation où il intègre la partie produit, blog, etc. « Pour ce genre de marchand, on propose un plugin du module de paiement qui fonctionne au bout de 15 min. Ce type d’intégration est le plus adopté par les e-marchands par Maroc. », souligne Mustapha Badr-Ezzaman. Quand le e-marchand est avisé et dispose de connaissances techniques, il fait généralement appel à une agence spécialisée qui intègre des fonctionnalités spécifiques selon le besoin. « On propose des API de paiement, c’est-à-dire des interfaces de programmation applicative où le parcours de paiement est plus fluide », note-t-il. Enfin, les grands comptes utilisent généralement ce que l’on appelle« API bas-niveau » qui offrent une liberté de programmation et une agilité quant à l’expérience client. « Cela demande une connaissance poussée dans la monétique et quelques certifications en monétique et en sécurité comme la PCI DSS », précise l’expert.
Mais combien devrait débourser un e-marchands qui souhaite intégrer une solution de paiement en ligne ? En plus des frais de mise en place, « généralement une commission de 0,5% est appliquée sur chaque transaction par le PSP », précise-t-on. Selon les données du CMI, l’acquéreur facture 2% pour une carte marocaine et 2,75% % pour une carte étrangère.
C’est-à-dire qu’in fine, pour 100 DH d’une vente en ligne, le e-marchand est payé 97,5 DH pour une carte marocaine et 96,75 DH pour une carte étrangère.
« Légalement parlant, aucune facturation aux e-commerçants n’a été imposée par BKAM ou par les processeurs internationaux comme Visa et MasterCard aux acquéreurs ou aux PSP. Chacune des parties prenantes (acquéreurs et PSP) est libre de facturer ce qui lui semble correct à son offre. Il ne serait pas illégal d’offrir le service à 0,1% ou à 5% », tient à souligner Mustapha Badr-Ezzaman.
Le e-commerçant qui veut proposer le paiement en ligne doit absolument être une personne morale. Il renseigne la procédure d’adhésion auprès de l’acquéreur et le PSP qui vérifient les conditions d’éligibilité. Si la demande est validée, une déclaration est envoyée à Visa et Mastercard par l’acquéreur ou par le PSP. Une fois, le e-marchand est validé, l’acquéreur évalue le risque : « il faut protéger le consommateur marocain en appliquant des cautions au marché », souligne notre interlocuteur.
Toutefois, bien que le e-commerce entre peu à peu dans les mœurs, le paiement en ligne est à la peine. « Seulement 10% des transactions sont effectuées en ligne alors que le paiement est l’étape décisive de l’expérience d’achat sur un site e-commerce », souligne-t-il. Il estime que l’ensemble des acteurs de la chaîne de valeur e-commerce ont une part de la responsabilité : « Du porteur de carte qui préfère payer en cash par peur d’être arnaqué ou se faire voler ses données bancaires au gouvernement qui doit opérationnaliser ses services de paiement e-gov en passant par les banques qui ne proposent pas des produits adaptés, les assurances et des procédures compliquées en cas de problème ou la e-logistique qui doit être adaptée aux exigences d’immédiateté exprimées par les client »,
Le paiement en ligne demeure un levier de performance et de croissance pour les entreprises. « Une expérience d’achat optimale passe par un parcours de paiement simple et sécurisé car si le commerce en ligne ne connait de frontières géographiques, les e-marchands marocains doivent tenter l’internationalisation, mais ceci est un autre sujet », conclut notre interlocuteur.
Source: Media24